EIV - Proposition 15

  • 9 juin 2004

Un Désir qui naît de la connaissance vraie du bon et du mauvais, peut être éteint ou réduit par beaucoup d’autres Désirs naissant des affections par lesquelles nous sommes dominés.

DÉMONSTRATION

De la connaissance vraie du bon et du mauvais, en tant qu’elle est une affection (Prop. 8), naît nécessairement un Désir (Déf. 1 des Affections), et il est d’autant plus grand que l’affection d’où il naît est plus grande (Prop. 37, p. III). Puisque cependant ce Désir (par hypothèse) naît de ce que nous connaissons quelque chose vraiment, il se forme donc en nous en tant que nous agissons (Prop. 3, p. III) et doit ainsi être connu par notre essence seule (Déf. 2, p. III) ; conséquemment (Prop. 7, p.III), sa force et sa croissance doivent être définies par la seule puissance de l’homme. Maintenant les Désirs qui naissent des affections par lesquelles nous sommes dominés, sont aussi d’autant plus grands que ces affections seront plus violentes ; par suite leur force et leur croissance doivent être définies par la puissance des causes extérieures (Prop. 5) qui, comparée à la nôtre, la surpasse indéfiniment (Prop. 3). Par suite, les Désirs qui naissent d’affections de cette sorte pourront être plus violents que celui qui naît de la connaissance vraie du bon et du mauvais ; et par là (Prop. 7) pourront réduire ou éteindre ce dernier. C.Q.F.D. [*]


Cupiditas quæ ex vera boni et mali cognitione oritur, multis aliis cupiditatibus quæ ex affectibus quibus conflictamur oriuntur, restingui vel coerceri potest.

DEMONSTRATIO :

Ex vera boni et mali cognitione quatenus hæc (per propositionem 8 hujus) affectus est, oritur necessario cupiditas (per 1 affectuum definitionem) quæ eo est major quo affectus ex quo oritur major est (per propositionem 37 partis III). Sed quia hæc cupiditas (per hypothesin) ex eo quod aliquid vere intelligimus, oritur, sequitur ergo ipsa in nobis quatenus agimus (per propositionem 3 partis III) atque adeo per solam nostram essentiam debet intelligi (per definitionem 2 partis III) et consequenter (per propositionem 7 partis III) ejus vis et incrementum sola humana potentia definiri debet. Porro cupiditates quæ ex affectibus quibus conflictamur oriuntur, eo etiam majores sunt quo hi affectus vehementiores erunt atque adeo earum vis et incrementum (per propositionem 5 hujus) potentia causarum externarum definiri debet quæ, si cum nostra comparetur, nostram potentiam indefinite superat (per propositionem 3 hujus) atque adeo cupiditates quæ ex similibus affectibus oriuntur, vehementiores esse possunt illa quæ ex vera boni et mali cognitione oritur ac proinde (per propositionem 7 hujus) eandem coercere vel restinguere poterunt. Q.E.D.


[*(Saisset :) Le désir qui naît de la connaissance vraie du bien et du mal peut être détruit ou empêché par beaucoup d’autres désirs qui naissent des passions dont notre âme est agitée en sens divers. Démonstration De la connaissance vraie du bien et du mal, en tant qu’elle est une passion (par la Propos. 8), provient nécessairement un désir (par la Déf. 1 des passions), lequel est d’autant plus fort que la passion d’où il provient est elle-même plus forte (par la Propos. 37, part. 3) ; mais comme ce désir (par hypothèse) naît de ce que nous avons une connaissance vraie, il s’ensuit qu’il est en nous, en tant que nous agissons (par la Propos. 3, part. 3), et partant qu’il doit être conçu par notre seule essence (en vertu de la Déf. 2, part. 3), et que sa force et son accroissement doivent se mesurer par la seule puissance de l’homme (Propos. 7, part. 3). Or, les désirs qui naissent des passions qui agitent notre âme en sens divers sont d’autant plus forts que ces passions ont plus d’énergie, et par conséquent leur force et leur accroissement (en vertu de la Propos. 5) doivent se mesurer par la puissance des causes extérieures, laquelle, si on la compare à la nôtre, la surpasse indéfiniment (par la Propos. 3) ; et ainsi donc les désirs qui naissent de passions semblables peuvent être plus forts que celui qui naît de la connaissance vraie du bien et du mal, et partant (par la Propos. 7) ils peuvent étouffer ou empêcher ce désir. C. Q. F. D.

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