Traité politique, II, §16

  • 5 décembre 2004



Quand des hommes ont des droits communs et que tous sont conduits comme par une seule pensée [1], il est certain (par le § 13 de ce chapitre) que chacun a d’autant moins de droit que tous les autres réunis l’emportent sur lui en puissance, c’est-à-dire que chacun n’a en réalité de droit sur la nature, qu’autant que lui en confère la loi commune. Tout ce, d’autre part, qui lui est commandé par une volonté commune, il est tenu de le faire ou encore (par le § 4 de ce chapitre) on a le droit de l’y obliger.


Traduction Saisset :

Partout où les hommes ont des droits communs et sont pour ainsi dire conduits par une seule âme, il est certain (par l’article 13 du présent chapitre) que chacun d’eux a d’autant moins de droits que les autres ensemble sont plus puissants que lui, en d’autres termes, il n’a d’autre droit que celui qui lui est accordé par le droit commun. Du reste, tout ce qui lui est commandé par la volonté générale, il est tenu d’y obéir, et (par l’article 4 du présent chapitre) on a le droit de l’y forcer.


Ubi homines iura communia habent omnesque una veluti mente ducuntur, certum est (per art. 13. huius cap.) eorum unumquemque tanto minus habere iuris, quanto reliqui simul ipso potentiores sunt, hoc est, illum revera ius nullum in naturam habere praeter id, quod ipsi commune concedit ius. Ceterum quicquid ex communi consensu ipsi imperatur, teneri exequi vel (per art. 4. huius cap.) iure ad id cogi.

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