EIV - Proposition 7

  • 26 mai 2004

Une affection ne peut être réduite ni ôtée sinon par une affection contraire, et plus forte que l’affection à réduire.

DÉMONSTRATION

Une affection, en tant qu’elle se rapporte à l’Âme, est une idée par laquelle l’Âme affirme une force d’exister de son Corps plus grande ou moindre qu’auparavant (Définition générale des Affections à la fin de la troisième partie). Quand donc l’Âme est dominée par quelque affection, le Corps est affecté en même temps d’une affection qui accroît ou diminue sa puissance d’agir. En outre, cette affection du Corps (Prop. 5) reçoit de sa cause la force de persévérer dans son être ; elle ne peut donc être réduite ni ôtée, sinon par une cause corporelle (Prop. 6, p. II) qui affecte le Corps d’une affection contraire à elle (Prop. 5, p. III) et plus forte (Axiome), et alors (Prop. 12, p. II) l’Âme sera affectée de l’idée d’une affection plus forte, et contraire à la première, c’est-à-dire (Défin. gén. des Affections) que l’Âme éprouvera une affection plus forte, et contraire à la première, qui exclura ou ôtera l’existence de la première, et par suite une affection ne peut être ni ôtée ni réduite sinon par une affection contraire et plus forte. C.Q.F.D. [*]


Affectus nec coerceri nec tolli potest nisi per affectum contrarium et fortiorem affectu coercendo.

DEMONSTRATIO :

Affectus quatenus ad mentem refertur est idea qua mens majorem vel minorem sui corporis existendi vim quam antea affirmat (per generalem affectuum definitionem quæ reperitur sub finem tertiæ partis). Cum igitur mens aliquo affectu conflictatur, corpus afficitur simul affectione qua ejus agendi potentia augetur vel minuitur. Porro hæc corporis affectio (per propositionem 5 hujus) vim a sua causa accipit perseverandi in suo esse ; quæ proinde nec coerceri nec tolli potest nisi a causa corporea (per propositionem 6 partis II) quæ corpus afficiat affectione illi contraria (per propositionem 5 partis III) et fortiore (per axioma hujus) atque adeo (per propositionem 12 partis II) mens afficietur idea affectionis fortioris et contrariæ priori hoc est (per generalem affectuum definitionem) mens afficietur affectu fortiori et contrario priori qui scilicet prioris existentiam secludet vel tollet ac proinde affectus nec tolli nec coerceri potest nisi per affectum contrarium et fortiorem. Q.E.D.


[*(Saisset :) Une passion ne peut être empêchée ou détruite que par une passion contraire et plus forte. Démonstration Une passion, en tant qu’elle se rapporte à l’âme, c’est une idée par laquelle l’âme affirme la force d’existence plus grande ou plus petite de son corps (en vertu de la Déf. gén. des passions qui se trouve à la fin de la partie 3). Lors donc que l’âme est agitée par quelque passion, le corps éprouve en même temps une affection qui augmente ou diminue sa puissance d’agir. Or cette affection du corps reçoit de sa cause (par la Propos. 5) la force de persévérer dans son être et cette force ne peut donc (par la Propos. 6, part. 2) être empêchée ou détruite que par une cause corporelle, qui fasse éprouver au corps une affection contraire à la première (par la Propos. 5, part. 3), et plus forte (Par l’Axiome) ; et par conséquent l’âme est affectée (par la Propos. 12, part. 2) de l’idée d’une affection contraire à la première, et plus forte ; en d’autres termes (par la Déf. gén. des passions), elle éprouve une passion contraire à la première et plus forte, qui exclut par conséquent ou détruit la première ; d’où il résulte finalement qu’une passion ne peut être empêchée ou détruite que par une passion contraire et plus forte. C. Q. F. D.

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