Chapitre VII

De la Joie et de la Tristesse.

  • 26 août 2006


(1) Ayant vu de quelle nature sont la Haine et l’Étonnement, et que, nous pouvons le dire sûrement, jamais ces passions ne peuvent trouver place en ceux qui usent bien de leur entendement, nous continuerons de même et traiterons des autres passions ; et pour commencer, soient d’abord le Désir et la Joie ; à leur sujet, attendu qu’elles proviennent des mêmes causes d’où naît l’amour, nous n’avons rien à dire, sinon que nous devons nous rappeler ce que nous avons dit précédemment [*] ; sur quoi nous les laissons pour le moment.


(2) A ces passions nous joindrons la Tristesse de laquelle nous pouvons dire qu’elle ne naît que de l’opinion et de l’erreur en provenant ; car elle a pour cause la perte de quelque bien.
Nous avons dit auparavant que tout ce que nous faisons devait servir à l’avancement et à l’amélioration. Or il est certain que, tant que dure notre affliction, nous nous rendons impropres à rien faire de tel ; c’est pourquoi il faut que nous nous dérobions à la tristesse, ce que nous pouvons faire en pensant au moyen de recouvrer la chose perdue, autant qu’il est en notre pouvoir ; et si nous ne le pouvons pas, [en pensant] qu’il faut néanmoins nous délivrer de la tristesse, afin de ne pas tomber dans toutes les misères qu’elle amène nécessairement avec elle. Et il faut que nous fassions l’un et l’autre avec joie, car il est insensé de vouloir rétablir et réparer un bien perdu par un mal désiré et entretenu par nous.

(3) Enfin, qui use bien de son entendement doit nécessairement connaître Dieu, puisque Dieu est, comme nous l’avons démontré, le souverain bien et tout bien. D’où il suit, sans contredit, que quelqu’un qui use bien de son entendement ne peut tomber dans aucune tristesse. Comment non ? Il repose dans le bien qui est tout bien et en quoi il y a plénitude de toute joie et de toute satisfaction.
De l’opinion donc ou de la non-connaissance provient la tristesse comme il a été dit [**].



[*chap. III, §9 et chap. V (note jld).

[**Cette dernière phrase, mise entre crochets dans l’édition van Vloten et Land, ne ce trouve que dans le manuscrit A.

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