EII - Proposition 11

  • 12 avril 2004

Ce qui constitue en premier l’être actuel de l’âme humaine n’est rien d’autre que l’idée d’une chose singulière existant en acte.

DÉMONSTRATION

L’essence de l’homme (Coroll. de la Prop. préc.) est constituée par certains modes des attributs de Dieu ; savoir (Ax. 2) par des modes du penser ; de tous ces modes (Ax. 3) l’idée est de sa nature le premier et, quand elle est donnée, les autres modes (ceux auxquels l’idée est antérieure de sa nature) doivent se trouver dans cet individu (même Axiome) ; ce qui constitue en premier l’être d’une Âme humaine, est donc une idée. Non cependant l’idée d’une chose non existante. Car autrement cette idée (Coroll. de la Prop. 8) ne pourrait être dite exister ; ce sera donc l’idée d’une chose existant en acte. Non, toutefois, d’une chose infinie ; car une chose infinie (Prop. 21 et 22, p. I) doit toujours exister nécessairement. Or cela est absurde (Ax. 1) ; donc ce qui constitue en premier l’être actuel de l’Âme humaine, est l’idée d’une chose singulière existant en acte. C.Q.F.D. [*]


Primum quod actuale mentis humanæ esse constituit, nihil aliud est quam idea rei alicujus singularis actu existentis.

DEMONSTRATIO :

Essentia hominis (per corollarium præcedentis propositionis) a certis Dei attributorum modis constituitur nempe (per axioma 2 hujus) a modis cogitandi quorum omnium (per axioma 3 hujus) idea natura prior est et ea data reliqui modi (quibus scilicet idea natura prior est) in eodem debent esse individuo (per axioma 3 hujus). Atque adeo idea primum est quod humanæ mentis esse constituit. At non idea rei non existentis. Nam tum (per corollarium propositionis 8 hujus) ipsa idea non potest dici existere ; erit ergo idea rei actu existentis. At non rei infinitæ. Res namque infinita (per propositiones 21 et 22 partis I) debet semper necessario existere ; atqui hoc (per axioma 1 hujus) est absurdum ; ergo primum quod esse humanæ mentis actuale constituit, est idea rei singularis actu existentis. Q.E.D.


[*(Saisset) : Le premier fondement de l’être de l’âme humaine n’est autre chose que l’idée d’une chose particulière et qui existe en acte. Démonstration Ce qui constitue l’essence de l’homme (par le Corollaire de la Propos. précédente), ce sont certains modes des attributs de Dieu, savoir (par l’Axiome 2) des modes de la pensée, entre lesquels l’idée est (par l’Axiome 3) de sa nature antérieure à tous les autres, de façon que si elle est donnée, tous les autres modes (ceux auxquels l’idée est antérieure de sa nature) doivent se trouver dans le même individu (par le même axiome]). Ainsi donc, l’idée est le premier fondement de l’être de l’âme humaine. Mais cette idée ne peut être celle d’une chose qui n’existe pas actuellement ; car alors (par le Corollaire de la Propos. 8) l’idée elle-même n’existerait pas actuellement. Ce sera donc l’idée d’une chose actuellement existante, mais non pas d’une chose infinie ; car une chose infinie (par la Propos. 21 et la Propos. 22, partie 1), doit toujours exister nécessairement ; or ici, cela serait absurde (par l’Axiome 1). Donc, le premier fondement de l’être de l’âme humaine, c’est l’idée d’une chose particulière et qui existe en acte. C.Q.F.D.

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