Traité politique, III, §18

  • 30 décembre 2004


Pour ne pas être obligé de rompre à chaque instant le fil du discours et pour écarter des objections semblables qu’on pourrait me faire par la suite, j’avertis que j’ai établi tout cela en me fondant sur la nécessité de la nature humaine de quelque façon qu’on la considère. Je pars en effet de l’effort universel que font tous les hommes pour se conserver, effort qu’ils font également, qu’ils soient sages ou insensés. De quelque façon que l’on considère les hommes, qu’ils soient conduits par une affection ou par la raison, la conclusion sera donc la même puisque la démonstration, nous venons de le dire, est universelle.


Traduction Saisset :

Mais afin qu’il ne soit pas nécessaire d’interrompre si souvent le fil du discours et de résoudre de semblables objections, j’avertis le lecteur que j’ai démontré tous mes principes en m’appuyant sur la nécessité de la nature humaine prise en général, c’est-à-dire sur l’effort universel que font les hommes pour se conserver, lequel est inhérent à tous, sages ou ignorants ; et par conséquent, dans quelque condition que vous considériez les hommes, soit que la passion, soit que la raison les conduise, la conclusion sera la même, parce que, comme je l’ai dit, la démonstration est universelle.


Sed ne toties opus sit sermonis filum interrumpere et similes posthac obiectiones solvere, monere volo, me haec omnia ex naturae humanae quomodocumque consideratae necessitate demonstrasse, nempe ex universali omnium hominum conatu sese conservandi, qui conatus omnibus hominibus inest, sive ignari sive sapientes sint. Ac proinde quomodocumque homines sive affectu sive ratione duci considerentur, res eadem erit, quia demonstratio, ut diximus, universalis est.

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