EI - Proposition 5


Il ne peut y avoir dans la nature deux ou plusieurs substances de même nature ou attribut.

DÉMONSTRATION

S’il existait plusieurs substances distinctes, elles devraient se distinguer entre elles ou par la diversité des attributs ou par la diversité des affections (Proposition précédente). Si elles se distinguent seulement par la diversité des attributs, il est donc accordé qu’il n’y en a qu’une du même attribut. Si maintenant elles se distinguent par la diversité des affections, comme une substance (Proposition 1) est antérieure en nature à ses affections, on ne pourra, mettant ses affections à part et la considérant en elle-même, c’est-à-dire (Définition 3 et Axiome 6) en vérité, la concevoir comme distincte d’une autre, en d’autres termes il ne pourra y avoir plusieurs substances, mais seulement une. C.Q.F.D. [*]


In rerum natura non possunt dari duæ aut plures substantiæ ejusdem naturæ sive attributi.

DEMONSTRATIO :

Si darentur plures distinctæ, deberent inter se distingui vel ex diversitate attributorum vel ex diversitate affectionum (per propositionem præcedentem). Si tantum ex diversitate attributorum, concedetur ergo non dari nisi unam ejusdem attributi. At si ex diversitate affectionum, cum substantia sit prior natura suis affectionibus (per propositionem 1) depositis ergo affectionibus et in se considerata hoc est (per definitionem 3 et axioma 6) vere considerata, non poterit concipi ab alia distingui hoc est (per propositionem præcedentem) non poterunt dari plures sed tantum una. Q.E.D.

[*(Saisset) : Il ne peut y avoir dans la nature des choses deux ou plusieurs substances de même nature, ou, en d’autres termes, de même attribut. Démonstration S’il existait plusieurs substances distinctes, elles se distingueraient entre elles ou par la diversité de leurs attributs, ou par celle de leurs affections (en vertu de la Propos. précéd.). Si par la diversité de leurs attributs, un même attribut n’appartiendrait donc qu’à une seule substance ; si par la diversité de leurs affections, la substance étant antérieure en nature à ses affections (par la Propos. 1), il suivrait de là qu’en faisant abstraction des affections, et en considérant en elle-même une des substances données, c’est-à-dire en la considérant selon sa véritable nature par les Déf. 3 et l’Axiome 6), on ne pourrait la concevoir comme distincte des autres substances, ce qui revient à dire (par la Propos. précéd.) qu’il n’y a point là plusieurs substances, mais une seule. C. Q. F. D.