Traité politique, VII, §07



On ne peut contester que la majorité de ce conseil n’aura jamais le désir de faire la guerre, mais au contraire aura un grand zèle pour la paix et qu’elle la préférera toujours. Outre en effet qu’on craindra toujours que la guerre n’entraîne la perte des biens et de la liberté, elle exige des dépenses nouvelles, et les membres du conseil savent que leurs enfants et leurs proches occupés de leurs propres affaires, seront contraints de s’appliquer au métier des armes et de partir en campagne, ce qui ne leur rapportera rien que des cicatrices gratuites [1]. Je l’ai dit en effet dans le § 31 du chapitre précédent, aucune solde ne pourra être donnée aux hommes de la milice, et au § 10 du même chapitre j’ai dit que cette milice doit être formée des seuls citoyens [2].


Traduction Saisset :

Que la majeure partie de notre Conseil n’ait jamais le désir de faire la guerre, mais qu’au contraire elle soit toujours animée d’un grand zèle et d’un grand amour de la paix, c’est ce qui paraît indubitable. Car, outre que la guerre leur fait toujours courir le risque de perdre leurs biens avec la liberté, il y a une autre raison décisive, c’est que la guerre est coûteuse et qu’il faudra y subvenir par de nouvelles dépenses ; ajoutez que voilà leurs enfants et leurs proches, lesquels en temps de paix sont tous occupés de soins domestiques, qui seront forcés pendant la guerre de s’appliquer au métier des armes et de marcher au combat, sans espoir de rien rapporter au logis que des cicatrices gratuites. Car, comme nous l’avons dit à l’article 31 du précédent chapitre, l’armée ne doit recevoir aucune solde, et puis (article 10 du même chapitre) elle doit être formée des seuls citoyens.


Quin maiori huius concilii parti nunquam animus gerendi bellum, sed magnum pacis studium et amor semper futurus sit, dubitari non potest. Nam, praeterquam quod ex bello ipsis timor semper erit bona sua cum libertate amittendi, accedit, quod ad bellum novi sumptus requirantur, quos suppeditare debent, ac etiam quod ipsorum liberi et affines curis domesticis intenti studium ad arma in bello applicare et militatum ire cogentur, unde domum nihil praeter gratuitas cicatrices referre poterunt. Nam, uti art. 31. praeced. cap. diximus, militiae stipendia nulla solvenda, et art. 10. eiusdem cap. ipsa ex solis civibus et ex nullis aliis formanda.

[1Voyez Quinte-Curce, Histoires d’Alexandre le Grand, VIII, VII, II (référence de S. Zac).

[2Voyez le Traité théologico-politique, chap. XVII, §18 et §22.