EIII - Proposition 3

  • 1er mai 2004

Les actions de l’Âme naissent des seules idées adéquates ; les passions dépendent des seules idées inadéquates.

DÉMONSTRATION

Ce qui constitue en premier l’essence de l’Âme n’est rien d’autre que l’idée d’un Corps existant en acte (Prop. 11 et 13, p. II), et cette idée ([Prop. 15, p. II361]) est composée de beaucoup d’autres dont les unes sont adéquates (Coroll. Prop. 38, p. II), les autres inadéquates (Coroll. Prop. 29, p. II). Toute chose donc qui suit de la nature de l’Âme et dont l’Âme est la cause prochaine, par où cette chose se doit connaître, suit nécessairement d’une idée adéquate ou inadéquate. Mais, en tant que l’Âme a des idées inadéquates (Prop. 1), elle est nécessairement passive ; donc les actions de l’Âme suivent des seules idées adéquates et, pour cette raison, l’Âme pâtit seulement parce qu’elle a des idées inadéquates. C.Q.F.D. [*]


Mentis actiones ex solis ideis adæquatis oriuntur, passiones autem a solis inadæquatis pendent.

DEMONSTRATIO :

Primum quod mentis essentiam constituit, nihil aliud est quam idea corporis actu existentis (per propositiones 11 et 13 partis II) quæ (per propositionem 15 partis II) ex multis aliis componitur quarum quædam (per corollarium propositionis 38 partis II) sunt adæquatæ, quædam autem inadæquatæ (per corollarium propositionis 29 partis II). Quicquid ergo ex mentis natura sequitur et cujus mens causa est proxima per quam id debet intelligi, necessario ex idea adæquata vel inadæquata sequi debet. At quatenus mens (per propositionem 1 hujus) ideas habet inadæquatas eatenus necessario patitur ; ergo mentis actiones ex solis ideis adæquatis sequuntur et mens propterea tantum patitur quia ideas habet inadæquatas. Q.E.D.


[*(Saisset :) Les actions de l’âme ne proviennent que des idées adéquates, ses passions que des idées inadéquates. Démonstration Ce qu’il y a de fondamental et de constitutif dans l’essence de l’âme, ce n’est autre chose que l’idée du corps pris comme existant en acte (par les Propos. 11 et 13, partie 2), laquelle idée se compose de plusieurs autres idées (par la Propos. 15, partie 2), les unes adéquates (par le Corollaire de la Propos.38, partie 2), les autres inadéquates (par le Corollaire de la Propos.29, partie 2). Ainsi donc, tout ce qui suit de la nature de l’âme et dont l’âme est la cause prochaine, tout ce qui, en conséquence, doit être conçu par elle, tout cela, dis-je, doit nécessairement suivre d’une idée adéquate ou d’une idée inadéquate. Or, en tant que l’âme a des idées adéquates, elle pâtit (par la Propos. 1, partie 3) ; donc les actions de l’âme ne suivent que des idées adéquates, et, par conséquent, l’âme ne pâtit qu’en tant qu’elle a des idées inadéquates. C. Q. F. D.

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