TRE - 89

  • 28 septembre 2005


Ajoutez qu’ils sont formés au gré du vulgaire et selon sa manière de voir ; de sorte qu’ils sont des signes des choses, telles qu’elles sont dans l’imagination et non telles qu’elles sont dans l’entendement, comme il se voit clairement de ce que l’on a souvent appliqué à toutes les choses qui sont seulement dans l’entendement et ne sont pas dans l’imagination des noms négatifs, par exemple : incorporel, infini, etc., et aussi de ce que l’on exprime négativement beaucoup de choses qui sont en réalité affirmatives et inversement comme : incréé, indépendant, infini, immortel, parce qu’effectivement nous imaginons avec beaucoup plus de facilité leurs contraires et que ces dernières se sont ainsi offertes les premières aux premiers hommes et ont accaparé les termes affirmatifs. Beaucoup d’affirmations et de négations prennent naissance parce que la nature des mots s’y prête, et non la nature des choses ; c’est pourquoi si nous ignorions cela nous prendrions facilement le faux pour le vrai.


Adde quod sint constituta ad libitum et ad captum vulgi, adeo ut non sint nisi signa rerum, prout sunt in imaginatione, non autem prout sunt in intellectu ; quod clare patet ex eo, quod omnibus iis, quae tantum sunt in intellectu, et non in imaginatione, nomina imposuerunt saepe negativa, uti sunt, incorporeum, infinitum etc. ; et etiam multa, quae sunt revera affirmativa, negative exprimunt, et contra, uti sunt increatum, independens, infinitum, immortale etc., quia nimirum horum contraria multo facilius imaginamur ; ideoque prius primis hominibus occurrerunt et nomina positiva usurparunt. Multa affirmamus et negamus, quia natura verborum id affirmare et negare patitur, non vero rerum natura ; adeoque hac ignorata facile aliquid falsum pro vero sumeremus.


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Ensuite, comme les mots sont une partie de l’imagination, c’est-à-dire comme nous forgeons beaucoup de concepts suivant que, par une disposition (...)